~ 1er Cours [en cours] ~

Elizabeth n'avait pas choisi ce poste de professeur pour rien. Non, elle pensait qu'il serait bon de partager ses connaissances avec de petits esprits naïfs. Pour elle, les élèves étaient comparables à des chiens : plus on les éduquait tôt mieux ils se montraient fidèles et obéissants. L'obéissance... un mot qu'Elizabeth ne connaissait guère car elle ne l'avait jamais appliqué. Elle avait toujours profité pleinement de sa vie de débauche avec pour seul dictateur, son désir. Elle était, par ailleurs, le dictateur des autres, ses complices, qui l'avaient toujours servie fidèlement. Elle savait donc parfaitement donner des ordres mais n'acceptait pas d'en recevoir. C'est une des raisons pour lesquelles elle avait postulé comme professeur. Au final, le choix de la matière l'importait peu. « Sortilèges et Enchantements », cela avait été complètement impulsif. Les autres postes ne l'intéressaient pas de toute façon. Elle voulait celui-ci et pas un autre et comme rien ne lui avait jamais résisté... Il fallait croire que cette école aussi se pliait à ses quatre volontés.

Elizabeth n'avait jusqu'alors croisé aucun professeur « intéressant ». Oui, car pour mériter son attention, il faut se montrer « intéressant ». Comprenez par là : appétissant. C'était le maître mot qui régissait tout son monde. Non pas quelle voyait les gens comme de vulgaires morceaux de viande ambulants mais sa passion pour le sang avait remplacé de son vocabulaire les mots « beau », « ravissant » et « radieux » par « appétissant », « succulent » et « à croquer ». De toute manière, elle ne pouvait réfréner cette envie, ce désir profond pour le sang humain ; et elle ne le cherchait pas, mais ne le faisait pas non plus savoir. Elle agissait tel un prédateur, se fondant dans le milieu naturel de ses proies pour mieux jouer avec. Elle savait néanmoins qu'il lui lui faudrait se retenir de goûter à ses précieux sujets lors des cours mais en dehors, c'était une toute autre histoire...

Finalement, la nouvelle au poste pénétra dans ce qui semblait être sa future salle de classe. Le dégoût déforma alors les traits de son visage. Cette salle était bien trop propre et rangée pour être à son goût ! Elle entreprit alors de tout dévirer. Elle se plaça sur le bureau, près d'un tableau à craies et leva les mains en quelques secondes, avec grâce et légèreté. S'en suivit une onde dévastatrice qui renversa tables et chaises et mis la salle sans dessus dessous. Elizabeth remarqua alors l'absence d'élèves. Comment pouvait-elle leur apprendre des choses s'ils étaient absents ?! Par ailleurs, elle ne se souvenait pas en avoir croisé un seul dans toute l'école et la liste des élèves lui revint soudain en mémoire. Deux ou trois, pas plus. Pas suffisant. Un léger doigté et les chaises se mettaient alors à flotter dans les airs, si haut qu'il était bientôt impossible de s'asseoir. Le message était clair : pas de cours !
Elizabeth se saisit soudain d'une craie blanche et écrivit sur le tableau noir et poussiéreux : « mes chaires fraiches, nous manquons d'effectifs à mon goût, le cours ne débutera donc que lorsque nous serons au moins six. »

Elizabeth aimait se mettre en scène. Elle se plaisait à être le centre d'attention. Voilà pourquoi elle avait choisi d'attendre un nombre suffisant de jeunes élèves pour commencer son enseignement.

Laissant la salle en bazar, avec des chaises flottant dans les airs, Elizabeth passa la porte en direction de la sortie, décidément ennuyée.

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